Marche funèbre
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le 25 févr. 2016
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Auteur d'une courte mais reconnue filmographie, Alejandro Gonzáles Iñárritu s'est voilà peu de nouveau distingué au moyen du très médiatisé The Revenant, long-métrage qui lui aura rapporté au passage, et pour la seconde fois consécutive, l'Oscar du Meilleur réalisateur
De fil en aiguille, l'attente autour de ce survival "sensoriel" (tel qu'il était présenté) se devinait aisément au moyen de divers éléments lui étant propre, mais je craignais que la hype conséquente entourant la performance de DiCaprio n'ait quelque peu parasité notre perception même du film en tant que tel ; moi-même n'ayant pas vu Birdman (je n'ai d'ailleurs vu que Babel du cinéaste mexicain, qui ne m'avait alors pas enthousiasmé), c'est dire que ce nouvel Iñárritu s'auréolait avant tout du miroitement inhérent à la présence de Leo, et ce plutôt que le potentiel technique comme narratif de The Revenant.
Au terme de ces tergiversations, il faut bien reconnaître que le film n'a nullement volé ses trois Oscars, The Revenant se posant comme une expérience des plus immersives à l'aide d'une réalisation de haute volée : sur ce point, sa pléiade de plan-séquences, à commencer par cette fabuleuse intro à couteaux tirés, souligne avec force une essence graphique proprement estomaquante, alors en totale harmonie avec la photographie somptueuse d'Emmanuel Lubezki, qui contribue grandement à notre projection au sein de cet univers froid, âpre et impitoyable.
La beauté sans borne des nombreux décors naturels, observateurs silencieux d'une violence à l'état brut, donne ainsi lieu à un contraste patent qui ne manque pas de conférer au tout une saveur particulière, point d'ancrage ultime d'une immersion sans retour... ou presque : en effet, la grande tare de The Revenant est d'être beaucoup trop long, son intrigue déjà bien effilée s'étirant à n'en plus finir au point d'alourdir le récit et de menacer de saper l'attention du spectateur (je ne cache pas avoir retenu quelques bâillements) ; de fait, cette même intrigue se voit quelque peu limitée en terme de portée scénaristique, ce semblant d'adaptation du roman de Michael Punke brillant davantage de par sa promesse d'une expérience viscéralement réaliste, et celle-ci est en tous points respectée, alors que le développement des protagonistes lui fait défaut (les flash-backs et autres séquences oniriques concourent à ce sentiment d'alourdissement du récit).
De plus, The Revenant écarte d'un revers de main toute forme d'éclaircissement en ce qui concerne le contexte géopolitique local, ce qui le dessert en partie dans la mesure où les rapports de forces régissant et influant la trame du film peuvent laisser dubitatifs ; la place des trappeurs francophones, présentés comme des gens sans foi ni loi manipulant de bien naïfs Arikaras, est ainsi des plus troubles, et ceci n'est qu'un exemple parmi tant d'autres illustrant le parti pris avant tout formel opéré par le long-métrage.
Pour le reste, The Revenant demeure un survival rayonnant dans son registre, tout en nous proposant un duel vengeur nous transportant aux combles du suspense : l'apport du duo DiCaprio/Hardy n'y est pas indifférent en ce sens, car si le premier cité se sera fendu d'une prestation justifiant certainement son Oscar, le second lui ne fait nullement de la figuration au point de jouer à armes égales, si ce n'est plus, avec son comparse du moment (qu'a bien pu faire Mark Rylance pour lui subtiliser cette statuette ?).
Le dénouement, base d'une confrontation finale climaxienne à souhait, résume enfin à merveille la réussite technique du film, bien qu'assujetti à des limites narratives évidentes, ce final nous laissant en quelque sorte sur notre faim ; on préférera donc s'en tenir à la performance matérielle et humaine réalisée ici, The Revenant constituant un divertissement formellement unique, soit un grand moment de cinéma.
Créée
le 15 mars 2016
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