Polar sophistiqué et maniériste par excellence, le premier film tourné aux States par le coréen Park Chan-Wook est une putain de claque cinématographique.
Thriller polymorphe, à la fois jeu de massacre, chronique adolescente, film à suspens glacial, c'est un chef d'oeuvre formel aussi bien que thématique. Débordant d'idées, le film est suffisamment dense pour réussir à canaliser l'audacité visuelle de Park Chan-Wook, ce qui n'était pas toujours le cas par le passé (Lady vengeance).
L'intrigue est retorse et forme un puzzle passionnant et riche. C'est racé, c'est élégant, on sent le fantôme du Hitchcock de l'Ombre d'un Doute roder dans les coins, et en même temps l'agressivité visuelle et thématique débouche sur une vraie modernité.
Tout est aux petits oignons, les costumes comme la B.O hypnotique du génial Clint Mansell, insurpassable pour apporter un climat anxiogène et obsessionnel.
La séquence du duet au piano (composition de Philip Glass) exécuté à l'unisson par la fille Stoker et son sulfureux oncle est d'ailleurs une merveille d'ambiguïté.
Provocateur, Stoker l'est assurément, forçant le spectateur à reconstituer le fil des événements et la force de leurs non-dits, les implications de telles ellipses ou choix de mise en scène.
Car derrière une façade classieuse comme jamais, le fond est résolument pervers, riche en tension érotique, en rapports vénéneux. C'est juste irrésistible.