(Attention spoiler)

Voici la mécanique du film : progressivement Il ne s'agit plus que d'une "enquête" pour dénouer le vrai du faux, comme dans un cluedo :

- Un personnage révèle un élément à un autre
- Le personnage qui a appris ce nouvel élément, le révèle à d'autres dans des têtes-à-têtes chiantissimes et interminables.
- De l'apprentissage de ce nouvel élément, se déduisent de nouveaux malentendus et des conséquences qui peuvent se résumer ainsi :

=> Le personnage de Béjo hurle
=> Sa fille Lucie est prostrée
=> Tahar Rahim est de plus en plus renfrogné

- Un nouvel élément apparaît et contredit ou complète le précédant.

Et hop on repart pour un tour, et ça dure 2h10. (bon le temps d'une introduction palpitante, où il est question de savoir si la bouffe est bonne, ou si le gamin Fouad peut aller descendre faire pipi dans la nuit).

Toute l'enquête repose sur la question de savoir la cause du coma de la femme de Tahar, et le tout prend des allures très marquées Soap Opéra. J'étais tombé récemment par hasard sur les feux de l'amour, et ce bon vieux Victor Newman torturé par ses démons,vivait des intrigues parfaitement similaires, des malentendus, des vrais/faux :
- Brandon a-t-il trompé Jessica ?
- Qui a tué Jacky ?
- Pourquoi Pamela ne veut plus me parler ?
- ...

Du drame, des émotions, des passions compliquées... La prétention auteurisante en moins, et le sourire goguenard de Victor en plus.

Et l'autre problème vient justement des acteurs.

A un moment donné, il faut arrêter de se voiler la face avec Bérénice Béjo, c'est très personnel, mais je trouve que ça n'est pas une actrice, elle ne sait absolument pas jouer la dépression, et encore moins l'hystérie, c'est tellement appuyé, tellement surjoué, tellement faux, surtout dans ces scènes où elle court après les enfants, que je n'ai pas pu retenir un rire moqueur (tout seul comme un couillon dans une salle blindée de gens silencieux, avec lesquels je devais probablement ne pas être du tout en phase).

Ensuite sa fille Lucie, qui est absolument consternante, mais on ne peut pas la blâmer, elle n'y peut rien la pauvre, vu que Farhadi multiplie les gros plans sur son visage, en lui demandant de jouer au concours de la plus belle tête de déprimé.

Concours disputé avec Béjo, Rahim, et même les enfants qui tirent la gueule en permanence, vraisemblablement aidés par un joli budget maquillage "cernes et poches sous les yeux".

Petite mention d'une scène qui m'a fait beaucoup rire (mais j'étais le seul malheureusement) et qui m'a rappelé le film "La Haine" avec le garçon qui raconte une histoire interminable, ici on a la même chose mais avec une employée bledarde un peu attardée qui ponctue ses phrases par des "Zarma" tous les trois mots, sauf qu'ici ça reste très premier degré et éminemment sérieux, sans que ça ne fasse rire personne (alors que franchement y a de quoi).


Le seul personnage qui au bout du compte m'est resté sympathique, et pour lequel j'ai eu un peu d'empathie, c'est l'iranien, parce que contrairement aux autres qui sont constamment dans la posture, la pose hyper calculée et totalement fausse, il est naturel, détendu, crédible, et attachant avec son accent de vache espagnole (La "Peintoure").

Reste au final, la mauvaise impression de m'être fait enfumer par un film mécanique, assez racoleur (la fin), artificiel, sans âme, et relevant franchement de l'imposture.

C'était le premier film de Farhadi que je regardais.
KingRabbit

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