Vittorio De Sica et son scénariste Cesare Zavattini explore la condition sociale dans la Rome d'après guerre, à travers le parcours et l'errance d'un retraité sans le sou.

Le sujet est abordé avec magistrale justesse. Il s'agit de quelques jours de la vie de ce vieil homme et son chien Flaik, sa seule compagnie. Le pauvre homme qui a toujours travaillé, n'a plus les moyens de payer son loyer à une propriétaire qui préférerait qu'il parte pour transformer son logement. Il essaie tous les moyens possibles pour trouver de l'argent honnêtement ; mais il constate dans ses pérégrinations que même ceux qu'il pensaient être des amis lui sont indifférents. C'est donc une profonde solitude qui ressort, et elle s'accentue tout au long de l'avancement du film. La scène de la mendicité est éloquente ; lorsque Umberto hésite a franchir le pas et à tendre complètement la main, ayant le sentiment de perdre sa dignité. Comme dans le reste du film Carlo Battisti délivre une prestation remarquable et il génère une profonde empathie. On se rapproche alors au plus près de la vérité.

Dans un genre complètement différent, en l’occurrence le western, on pourrait presque penser au Train sifflera trois fois, sorti la même année ; où le héros principal cherche également vainement du soutien tout au long du film.

Outre son chien auquel il tient plus que tout (comme en témoigne la scène où il le retrouve), Umberto n'est pas complètement seul puisqu'une sympathie réciproque se noue entre lui et une jeune employée de sa propriétaire. Cette dernière est également assez seule, enceinte et délaissée par ses amants. Elle est finalement le seul personnage humain qui a des égards pour lui.

À travers sa mise en scène De Sica véhicule une grande sensibilité et beaucoup d'humanité dans le regard porté sur ces laissés-pour-compte. Les sentiments d'Umberto sont ressentis par le spectateur, ne serait-ce qu'à travers le plan rapproché sur son regard perdu cherchant secours. La volonté de véracité va chercher jusque dans le fond sonore où l'on peut entendre le goutte à goutte d'un robinet où encore le bruit du gaz de cuisinière créant une immersion dans le quotidien.

Il y a peut-être quelques passages un peu plus longs, mais c'était un sujet difficile à aborder tout en gardant l'attention du spectateur et c'est largement réussi.

Umberto D. alerte sur la condition sociale des personnes âgées qui n'ont pas ou peu de revenus, sans famille, et qui n'ont plus la force de travailler. C'est un témoignage d'une époque tourmentée ; mais on peut se demander si il ne s'agit pas de notre futur avec les problèmes à venir liés au versement des retraites.

Le-gamoun
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le 11 sept. 2025

Modifiée

le 11 sept. 2025

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