Lunar Park
7.4
Lunar Park

livre de Bret Easton Ellis (2005)

Il y a des auteurs qui, toute leur carrière, ressassent encore et encore les mêmes obsessions, et dont la production n'est que variation autour d'un même thème, jusqu'à l'écoeurement. La beauté et sa perversion chez Mishima, le féminin chez Gary, ou la violence chez Ryu Murakami. Mais, aucun d'entre eux peut se targuer d'être aussi monomanique qu'Ellis, qui mettra toujours un point d'honneur à ne parler que d'américains friqués, dans un style aussi inimitable qu'irritant.


Mais, il arrive que l'artiste aie une petite fantaisie, et sorte du cadre qu'il s'est imposé; ça donnera par exemple Vie à Vendre chez Mishima, 1969 chez Murakami, ou la tétralogie d'Emile Ajar chez Gary. Volonté compréhensible de faire quelque chose de plus léger et de s'amuser un peu, de s'essayer à de nouvelles choses, loin des personnages caricaturaux dans lesquels tant 'auteurs peuvent s'enfermer.


Pour Ellis, nous avons donc Lunar Park, qui tranche nettement avec les précédents opus du maître. Il faut dire qu'on peut difficilement aller plus loin que Glamorama, ce chef-d'œuvre injustement boudé par les critiques et le public. Bret essaye d'être un peu plus chaleureux et laisse tomber le registre expérimental auquel il s'est habitué pour s'essayer à l'autobiographie.


On y découvre donc la vie fantasmée de l'écrivain en bon père de famille, ayant arrêté les drogues et l'alcool (enfin, il essaye très fort), dans le cadre charmant d'une banlieue américaine quelconque, profitant de son pavillon, de ses gosses, sa femme et son chien (enfin, il y aura toujours quelques étudiantes peu farouches à trousser dans les parages tout de même).


Ellis (ou plutôt son personnage) est un être humain déplorable. Il le sait, il n'en a rien a foutre, mais il essaie quand même de s'améliorer (sans trop y croire évidemment).

Et c'est hilarant; entre la description de ses errances passées, sa thérapie de couple, ses tentatives de créer des liens familiaux, les crises (légitimes) de sa femme quant à ses comportements quelque peu déviants, sa relation avec le dealer local, il y a tant de situations comiques à exploiter. Surtout lorque l'auteur a conservé une plume acérée, pour nous livrer un chefs d'oeuvre d'humoir noir qui fera sourire même le plus innocent des lecteurs pour peu qu'ils aient lu les précédents ouvrages du sieur Ellis.


Mais évidemment, cette tentation du bohneur (Ellis est gay, il ne risque pas d'avoir de femme, ni d'enfant) ne résistera pas à la fin du roman. Ellis est un écrivain; il restera condamné à être hanté par ses personnages.



SallyC
8
Écrit par

Créée

le 14 oct. 2025

Critique lue 6 fois

SallyC

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